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Gouvernement " efficace " : quand deux ministres se crêpent le chignon

politique
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La Semaine africaine

Gouvernement : Quand deux ministres se livrent en spectacle

Un certain nombre d’attributions jadis relevant du ministère de l’Economie forestière sont désormais transférées au ministère du Tourisme, au regard des décrets 2017-409 et 2017-412 du 10 octobre 2017. Il s’agit des attributions et compétences dévolues à la direction générale du Développement durable, le Fonds bleu pour le bassin du Congo et le Fonds vert pour le climat. La cérémonie de transfert de consignes entre les ministres Rosalie Matondo et Arlette Soudan-Nonault qui se déroulait le vendredi 21 octobre 2017 a tourné court.

Les deux ministres n’ont pas pu s’accorder sur le contrôle de l’Agence congolaise de la faune et des aires protégées. La collégialité gouvernementale a volé en éclats et les deux autorités de l’Etat se sont livrées à un triste spectacle, à telle enseigne qu’elles ont fini par ne plus signer le procès-verbal devant ponctuer cette passation supervisée par le directeur de cabinet du Secrétaire général du Gouvernement.

L’Agence congolaise pour la faune et les aires protégées, objet du litige public, a été créée par loi n°37-2008 du 28 novembre 2008. Ses articles 89 et 90 disposent que l’administration de la faune et des aires protégées est assujettie aux Eaux et forêts. Par ailleurs, la loi n° 34-2012 du 31 octobre 2012, en son article 2, stipule : «L’Agence congolaise de la faune et des aires protégées est placée sous la tutelle du ministère en charge de la faune et des aires protégées».
Forte de ces argumentaires, Mme Rosalie Matondo a fait comprendre à sa collègue de l’Environnement que l’agence ne pouvait être sous la tutelle de l’environnement qu’après une modification de la loi. 
Or, l’article n°1 du décret 2017-409 du 10 octobre 2017 relatif aux attributions du ministère de l’Economie forestière, stipule que le contrôle, l’évaluation, la police et la gestion de la chasse relèvent du ministère de l’Economie forestière. L’exégèse dans ces textes révèle donc une disharmonie entre la disposition légale des textes en vigueur et le régime juridique applicable désormais aux aires protégées nécessitant dès lors une modification des lois. Car, un décret ne peut pas abroger une loi.
Ces dispositions rappelées dans le procès-verbal ont provoqué l’exaspération de Mme Arlette Soudan-Nonault, qui a jeté le pavé dans la mare, en contestant en pleine séance le procès-verbal pourtant rédigé par les techniciens des deux ministères. Pour elle, les techniciens n’ont pas pu s’accorder sur ce procès-verbal. En accusatrice, elle a simplement dit: « Il s’est fait chez vous. C’est le point qui m’a été fait. L’un des exemples que je vous prends, c’est le projet Tridom II. Il est financé par le Fonds mondial de l’environnement. Les partenaires qui le gèrent au Congo m’ont adressé une correspondance pour me transférer les données qui étaient chez vous. J’ai le courrier dans la voiture, je peux le prendre. Ensuite, il y a des conventions que vous avez retenues. Je suis un peu embêtée. Je demanderai qu’on me prenne les documents dans ma voiture », a dit la ministre du Tourisme et de l’environnement, accusant sa collègue de rétention des dossiers.
D’un ton limpide, Mme Rosalie Matondo, très gênée par la tournure que prenait la cérémonie a reprécisé à sa collègue que toutes les directions générales relevant des segments de l’environnement et du développement durable lui revenaient. «Vous allez travailler sur tous les dossiers. On a, vous et moi, déjà fait la passation. Vous savez comment ça se passe. Nous n’allons pas ici nous mettre à faire un spectacle. Je pense que la passation entre deux ministres est une passation de consignes. Les cadres sont là pour répondre à vos préoccupations au quotidien, parce que vous les aurez maintenant. Ils sont là pour la continuité de l’Etat», a-t-elle indiqué.
«Mais non», a rétorqué Mme Arlette Soudan-Nonault. 
«Si, Madame, c’est comme ça que les choses se passent. J’ai fait la passation avec le ministre Djombo, on n’a pas détaillé les documents qu’il m’a transmis. Madame la ministre, je suis désolée. Maintenant, si depuis deux jours, vos collaborateurs disent qu’ils n’étaient pas d’accord avec le procès-verbal, je regrette. On signera une autre fois qu’on tombera d’accord», a répliqué Mme Rosalie Matondo, vivement déçue.
Et la cérémonie s’est prolongée ainsi sur le ton véhément de : «Mais non, ce n’est pas ainsi» ; «mais si, c’est bien ainsi». 
Dans cet embarras, Mme Arlette Soudan-Nonault, qui a présenté des excuses à l’assistance pour ce feuilleton humiliant et décevant ,a demandé aux journalistes de libérer la salle où les hurlements se faisaient de temps en temps entendre, afin de leur permettre de continuer le débat. Fait curieux, elles sont sorties de la salle sans avoir apposé leurs signatures sur le procès-verbal. 
Cyr Armel YABBAT-NGO

© La Semaine africaine.

Notre commentaire

Que pense notre compatriote d'adoption, François Soudan, de l'attitude de sa chère et tendre épouse ? La réponse, peut-être, dans le prochain numéro de " Jeune Afrique "... Dans ce cas, Mme Rosalie Matondo n'a qu'à bien se tenir.

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