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Congolais, je vous devais ça !

politique
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Congolais, qu’est-ce que vous êtes un peuple formidable !  Vous êtes si dociles que je n’ai jamais eu une seule once d’inquiétude. Trente-trois ans au pouvoir, qui l’eut cru ? Même dans mes rêves les plus fous, jamais je n’aurai imaginé une telle longévité d’autant que pendant tout ce temps-là, mon clan et moi n’avons cessé d’alimenter la presse à scandales, soit dans la rubrique des crimes de sang, soit dans celle des crimes économiques.  Grâce à vous, je suis devenu un homme immensément riche, moi, fils d’un paysan, qui croyais mourir pauvre, n’eut été la bonté du camaad Marien Ngouabi, un homme au grand cœur, qui eut la lumineuse idée de m’arracher au métier de simple instituteur auquel j’étais prédestiné. Je lui dis un grand merci pour m’avoir extirpé de là, même si en retour, j’ai été vache avec lui. Mais tout ça, c’est la vie.  Il y a des gentils, puis il y a des méchants comme moi qui ne reculent devant rien, quitte à tuer ou à cramer toute une région pour arriver à leurs fins.
 

 Oui, j’ai violé la constitution. Oui, j’ai réalisé le hold-up électoral. Oui, j’ai rempli la maison d’arrêt d’opposants politiques. Oui, j’ai jeté Jean Marie Mokoko, Paulin Makaya, Okombi Salissa et tous les autres contestataires en prison. Oui, j’ai libéré Modeste Boukadia, sur injonction de mes maitres depuis les bords de la seine. Oui, j’ai incendié la région du Pool et jeté ses populations en forêt. Oui, j’ai lancé une fatwa contre Ntumi pour insoumission à ma volonté et à mes désidératas.  Oui, j’ai siphonné les caisses de l’Etat et conduit le pays à la banqueroute. Et alors, où est le problème, même si rien de tout ceci n’aurait été possible si je n’avais bénéficié de l’aide de quelques abrutis ?

Pendant de longues années, mon clan et moi avons fait la fiesta avec votre argent. En à peine 33 ans, nous avons amassé une fortune colossale, acheté des biens mal acquis et planqué votre argent dans des banques offshore.  Conséquence : Les caisses de l’Etat sont aujourd’hui désespérément vides, vos salaires et pensions de retraite ne sont plus payés, pour couronner le tout, la dette de ce pays caracole à plus de 150 % du PIB. Oui, 150% et je m’en fous. ! Après tout, je ne serai plus de ce monde pour payer les dégâts. Quant à mes enfants et petits-enfants, ils sont à l’abri du besoin avec tout le magot que nous avons volé.

Pour vous sortir de ce pétrin, j’ai donc décidé de faire appel au FMI. Vous savez, cette banque des impérialistes blancs, toujours prompts à fouiner dans des scandales qui ne les regardent pas et dont j’ai toujours fustigé l’ingérence dans les affaires intérieures de mon pays quand il s’agit des scandales du clan Sassou sur des détournements massifs d’argent, les biens mal acquis ou Panama Papers.  J ’ai absolument besoin d’eux pour sauver mon régime. Il s’agit pour eux de nous prêter des sous en votre nom afin de renflouer les caisses. Des sous que vous, vos enfants et petits-enfants aurez à rembourser.   

Depuis quelques jours, les révélations de RFI sur la dette de mon pays font jaser les impérialistes locaux de l’opposition, comme ceux de l’étranger. Mais de quoi se mêlent-ils ces valets ? Sont-ils si jaloux pour ne pas savoir que le Congo c’est la propriété des Sassou et des Nguesso ? On me reproche de ne pas avoir dit la vérité au FMI sur le taux d’endettement du Congo. Et puis quoi encore ? Souvenez-vous de tous mes gros mensonges des années 80, 90 ou 2000, passés comme une lettre à la poste.  Je pourrai citer en vrac : le plan quinquennal, l’école pour tous, l’agriculture priorité des priorités, l’autosuffisance en l’an 200, la nouvelle espérance, le chemin d’avenir, la Nouvelle République et j’en passe. Pour quel résultat ? A vous d’apprécier.

Ouvrez les yeux. La situation catastrophique d’aujourd’hui n’est pas en soi une surprise. Après tant d’années passées à festoyer, nous savions déjà dès 2015 que nous avons conduit le pays au bord du gouffre.  C’est d’ailleurs pour cette raison et avec notamment l’aide des conseillers occultes comme  Moungalla, que j’ai violé la constitution de 2002 pour lui substituer une nouvelle : La constitution « crimes autorisés ». Celle qui, dans son article 96, me garantit l’impunité totale sur tous mes crimes et me confère le droit inaliénable de vie ou de mort sur tous les Congolais.

Mais, je vous le dis, soyez toujours aussi passifs. Gardez espoir et serrez la ceinture.

Jean Jacques Morawa 

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